Infirmier, une profession dangereuse ?

Nous voilà à l’aube du décès tragique de Carène, une infirmière de 38 ans, qui a ému et secoué la France entière. Cette jeune professionnelle de santé avait été agressée au couteau la vieille alors qu’elle exerçait dans son service du CHU de Reims. Mais au-delà de la tristesse et de l’indignation, cette tragédie requestionne la notion de sécurité au sein de la profession infirmière. En effet, peut-on objectivement affirmer qu’une infirmière travaille aujourd’hui en toute sécurité ?

Des statistiques accablants

Les infirmiers sont majoritairement inquiets des violences qu’ils peuvent potentiellement subir. En effet, en 2013 déjà, une enquête menée par l’Ordre National Infirmier en faisait déjà l’amer constat :

 » 81 % des infirmiers se déclarent en effet préoccupé par la violence potentielle sur leurs lieux de travail. 38% se disent fréquemment victimes de violences verbales, 20 % sont régulièrement confrontés à des menaces ou intimidations et 8 % à des violences physiques. »

Dans les faits, plus de 19 300 signalements d’atteinte aux personnes et aux biens ont été réalisés par plus de 391 établissements en France (OVNS, 2022). Les services les plus touchés sont respectivement ceux de la psychiatrie, des unités de soins de longue durée ainsi que des urgences.

Des conditions d’exercice peu aidantes

Il existe, au sein du métier d’infirmier, des facteurs favorisant l’émergence de la violence. En voici les principaux, bien que non exhaustifs.

Il s’agit tout d’abord de la solitude. En effet, et bien qu’il s’agisse d’un travail d’équipe, l’infirmier est très régulièrement amené à se retrouver seul avec le patient. Ce constat est d’autant plus vrai dans certains modes d’exercice : libéral, travail de nuit… La pénurie de professionnel vient également accentuer ce phénomène.

Ensuite, la surcharge de travail (et son corollaire, le manque de temps) constitue un autre facteur de risque. Les durées d’attente des patients se rallongent donc tandis que la qualité des soins est parfois mise à mal. Pour mieux comprendre son impact, il faut savoir que les reproches concernant la prise en charge et le temps d’attente jugé trop long constituent les principaux motifs en violence (OVNS, 2022).

Pour finir, les caractéristiques même des patients augmentent le risque de violence. En effet, les structures hospitalières accueillent très souvent une population en situation de grande vulnérabilité : douleur, deuil, annonce tragique… Dans ses situations, une personne au tempérament calme et avenant pourra tout à fait se révéler agressive en situation d’angoisse ou de douleur intense.

Proposition d’actions de prévention

Pour tenter de prévenir et de lutter contre la violence à l’encontre des professionnels de santé, l’observatoire national des violences en milieu de santé a émis, dans son dernier rapport en date de 2022, des propositions et des outils de solutions.

Ils invitent en premier lieu les professionnels de santé à se former sur la gestion de l’agressivité (stratégie de désamorçage, action à mettre en œuvre…). Cette proposition avait par ailleurs déjà été réclamée par 85 % des infirmiers en 2013 (ONI, 2013). Outre la formation de la théorie générale, il serait également pertinent de proposer à chaque nouvel infirmier recruté un temps d’information sur les différents dispositifs existants dans la structure (protocoles, alarmes d’urgences du DECT…).

Ces mêmes infirmiers étaient également majoritairement (79 %) favorable à la présence plus importante d’agent de sécurité au sein même des structures. Parallèlement, l’OVNS invite individuellement chaque établissement à concevoir un projet de service personnalisé pour agir sur toutes les dimensions de l’institution.

 

En somme, des actions à l’échelle institutionnelle et nationale se mettent en place afin de réduire l’insécurité sur le lieu de travail des infirmiers. Cependant, les statistiques et les actualités démontrent que le chemin est encore long avant d’offrir un environnement sécure au personnel soignant. Toutefois, il semble important de rappeler que d’autres professions telles que les pompiers ou la police sont également régulièrement les victimes d’agressions physiques ou verbales.

 

Références

  • https://www.ordre-infirmiers.fr/actualites-presse/articles/violence-a-lencontre-des-professionnels-de-sante-81-des-infirmiers-se-declarent-preoccupes.html#:~:text=81%25%20des%20infirmiers%20se%20d%C3%A9clarent%20en%20effet%20pr%C3%A9occup%C3%A9s%20par%20la,8%25%20%C3%A0%20des%20violences%20physiques.https://www.ars.sante.fr/
  • lobservatoire-national-des-violences-en-milieu-de-sante-onvs-chiffres-cles-du-rapport-2022

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